L’attente
« Qu’attends-tu? » disons-nous parfois à quelqu’un qui hésite.
Peut-être attend-il une intuition, une aide, et souvent il espère l’amour qui inspire.
Presque toujours, ce que nous attendons c’est le bon moment. Parfois, il tarde. Que faisons-nous entre-temps ? Nous nous centrons et nous recueillons nos forces pour agir au bon moment, quand finalement il arrive.
Dans ce sens, l’attente est un temps de plénitude, orienté vers l’avant, toujours vers l’avant, jusqu’à ce qu’apparaisse ce qui rend l’action possible et nécessaire.
Il arrive aussi que nous attendions en vain. Nous attendons quelque chose que nous désirons, sans que cette chose puisse s’approcher de nous. Quand nous attendons le bonheur, il se fait souvent attendre. Ce qui est déjà ici, pourquoi l’attendre ? Ce qui est très loin nous demande plus de patience. Nous ignorons quand cela arrivera. Mais ce qui se trouve proche est déjà à notre portée, également le bonheur proche.
Il est ici, totalement et de façon inespérée. Quand ? Dès que nous l’aimons.

Plus
Tout développement est orienté vers le « plus » : plus de vie, plus d’amour, plus de bonheur, plus de réussite, plus de possibilités, plus de connaissances et de compréhensions. Dans le « plus », nous pouvons discerner un mouvement créateur à l’œuvre. Comme mouvement de création, il ne connaît que le « plus ». Comment pourrait décroître une impulsion créatrice ?
Et cependant, nous nous limitons nous-même, au service du « plus ». Alors que nous cherchons à rassembler nos forces, nous négligeons d’autres choses : le « plus » se transforme alors en « moins ». Le « plus » est en vérité différent du « beaucoup », il est beaucoup plus que le « beaucoup ». Il est un « plus » de ce qui est au service de la vie.

Par exemple, la discipline est d’une part « moins » et d’autre part « plus », parce qu’elle rend possible le « plus ». Le recueillement est aussi « plus » et « moins ». Il atteint plus car c’est un moins, moins de tous les aspects accessoires qui réduisent l’avance au lieu de l’augmenter. Même en amour, le « moins » est parfois « plus », moins d’attentes et moins de rêveries. Et bien sûr, moins d’erreurs, moins d’artifices et moins d’usure sont « plus ».

Pouvoir « moins » n’est jamais un plus, savoir « moins » et comprendre « moins » non plus.

Mais surtout, quelque chose se transforme en « moins » lorsqu’il y a une exclusion. L’illusion que nous pouvons recevoir ou atteindre plus alors que nous retirons quelque chose à quelqu’un, nous mène presque toujours vers le « moins » plutôt que vers le « plus ».

Le « plus » est inclusif, toujours plus inclusif. Il s’enrichit et se complète grâce à l’autre. Ce « plus » réunit au lieu de séparer, puisqu’il est un « plus » d’amour pour tout, tel que c’est, pour tout tel que cela se meut et s’accroît. Dans ce sens, un « plus » est nécessaire dans la résistance, pour mener tout le monde vers l’avant. Dans cette résistance se trouve la connaissance, qui grandit avec elle. Bien évidemment, seulement quand cette résistance acquiesce à l’inclusion et renonce à l’exclusion.

Le mouvement vers « plus » s’adresse à tout et à l’ultime. Alors il se transforme en un mouvement de l’esprit qui nous conduit vers cet espace qui nous englobe et où tout est déjà inclus. Bien que nous commencions à peine à en prendre conscience.

Pour l’esprit qui créé tout en accord avec sa pensée d’amour, il n’y a ni « plus » ni « moins ». Seulement le tout.
Nous restons dans l’ouverture au tout, dans notre mouvement vers « plus », avec le tout présent à notre regard, avec tous, chaque fois plus présents à tout, avec amour.

Heureux
Etre heureux signifie se sentir large. Quand nous sommes heureux, nous nous étirons, respirons profondément et avec plus de liberté. Quand nous sommes heureux, nos yeux brillent. Ils voient mieux et plus amplement ce qui se présente à eux, et le capturent pour le verser dans notre for intérieur, où il devient plus vaste et abondant.

Quand nous sommes heureux, nous sommes en relation avec beaucoup, et unis à lui. Quand nous sommes heureux, notre moi baisse ses frontières car nous sommes heureux avec beaucoup d’autres.

Dans le bonheur, nous sommes plus libres. Nous laissons derrière nous le passé, nous sommes optimistes et regardons le futur.
Parfois, nous jouissons de nos souvenirs en silence, les souvenirs d’une belle fête peut-être, mais plus que tout probablement, les souvenirs heureux de notre enfance. Dans un moment de cafard, ces souvenirs remontant à la surface, peuvent ramener le sourire en nous.
Est-ce que ces souvenirs peuvent nous éloigner de notre situation actuelle ? Peut-être, sur le moment, ils peuvent nous connecter à la joie, et la bonne humeur nous poussera à regarder vers l’avant, vers ce qu’il y a maintenant, pour nous rendre heureux.

Surtout, le bonheur est dans l’esprit. En étant heureux, nous nous sentons partie intégrante d’un mouvement qui nous élève et nous emporte au loin. Nous abandonnons en lui ce qui est difficile dans notre vie, ce qui nous traîne et nous retient, nous le laissons derrière nous. Il s’agit alors d’un mouvement de l’esprit.

Nous sommes heureux en étant dans ce mouvement puissant, avec beaucoup d’autres. Comme lorsque nous dansons. Heureux, nous entrons dans une vibration qui s’étend à toutes les fibres de notre corps, le faisant chanter avec nous.

Les gens heureux chantent, à l’unisson, vibrant dans une grande mélodie, en un chant des planètes, dans un rythme infini, dans la pulsation de la vie, la pulsation de toute vie et tout amour.

Revue Hellinger Sciencia (2008)